Se soigner autrement pour être en bonne santé durablement : partie 3
1- Le Shiatsu, une pratique d’avenir issue d’une médecine ancestrale.
Le Shiatsu, littéralement « pression des doigts », est une technique manuelle japonaise basée sur les préceptes de la médecine chinoise.
Il s’agit d’une pratique au cours de laquelle le praticien de Shiatsu va travailler à faire circuler l’Energie dans les méridiens[1] à l’aide des pouces ou de la paume des mains.
Issu du massage Anma, il s’en distingue au début du XXème siècle de par l’apport de nouvelles technicités au sein de son protocole : la sollicitation des points d’acupuncture via le travail des méridiens, l’influence des arts martiaux lors de son utilisation dans les dojos en préparation/récupération sportive, les apports de plusieurs Senseï[2] fondateurs d’écoles (attention au Souffle, développement de traitements thérapeutiques, manipulations martiales, philosophie zen, travail fluidique, etc.).
Selon le ministère japonais de la Santé, du Travail et du bien-être social (oui oui il s’agit bien d’un seul et même ministère), le Shiatsu est un traitement qui utilise les pouces et la paume des mains pour faire pression en certains points du corps humain afin de corriger ses irrégularités et de conserver ou d’améliorer sa santé.
Pour le Parlement européen, il s’agit d’une approche complémentaire, d’une médecine non conventionnelle mais digne d’intérêt.
En France, enfin, où le Shiatsu a été introduit dans les années 1960 avec les arts martiaux, l’OMS dit de lui que c’est une méthode manuelle de relaxation et de bien-être qui utilise la pression des doigts sur des points d’acupuncture[3].
Si le Japon lie explicitement le Shiatsu à la santé et que l’Europe lui reconnaît un statut de médecine, pour la France, en revanche, il s’agit donc simplement d’une méthode de relaxation.
Pourtant les bienfaits de cette pratique sur leur santé sont reconnus par les receveurs des soins, et il est de plus en plus fait appel à des praticiens de shiatsu au sein des hôpitaux de Paris (interventions sur le personnel soignant, sur les patients du service pédopsychiatrie de la Pitié-Salpêtrière, etc.).
De même, en matière de maladies de civilisation[4], lorsque la médecine occidentale peine à trouver l’étiologie de la Sclérose en Plaques ou de la Fibromyalgie, et sèche quant aux traitements à leur appliquer, le Shiatsu sait accompagner ces maladies.
Sans avoir la prétention de guérir, c’est-à-dire de faire cesser la maladie, ce qui est bien l’objectif de la médecine occidentale, le Shiatsu va s’attacher à soigner.
Autrement dit, il va s’occuper à procurer des soins pour améliorer l’état de la personne et être attentif à son bien-être.
Le Shiatsu, loin de promettre des effets miraculeux sur des pathologies lourdes, a néanmoins le mérite de s’en occuper.
Ce n’est pas parce que l’on ne connaît pas une maladie que l’on ne peut rien faire pour soulager une personne souffrante. Si la maladie fait partie de la vie, à défaut de la supprimer, nous pouvons au moins faire ce qu’il faut pour vivre correctement avec, en diminuant les symptômes et en évitant les aggravations.
Et dès lors que l’on prend au sérieux l’état d’un patient et qu’on essaye de l’aider, alors un soulagement se fait déjà sentir.
Le soutien et l’accompagnement sont essentiels dans l’amélioration de l’état de santé par le positivisme qu’ils génèrent.
Pour d’autres cas comme les burn out ou les migraines par exemple, le suivi de Shiatsu est particulièrement efficace pour une rémission complète, sans médication.
Au sujet des maladies liées au style de vie, nous pourrions nous demander comment des maux issus du monde moderne ne trouvent pas de solutions dans leur médecine contemporaine, mais plutôt dans une médecine orientale qui existait pourtant bien avant leur apparition.
La réponse tient dans le fait que l’Homme occidental moderne, dans son mode de vie, a rompu avec l’équilibre naturel. Or l’essence de la médecine chinoise est de se calquer sur le modèle de la nature, de ses cycles, de ses éléments et de leurs interactions, et d’appliquer cet archétype au fonctionnement de l’être humain.
En bref, la maladie de civilisation est l’indicateur d’un dérèglement dans l’ordre naturel, et il faut revenir à l’équilibre pour la résorber.
Le Tao enseigne que « (…) l’Homme se règle sur la Terre, qui se règle sur le Ciel, lui-même se réglant sur la Voie, elle-même se réglant sur l’ordre naturel »[5].
La médecine chinoise applique donc ce concept de globalité où l’Homme forme un tout avec l’univers. Tout phénomène dans l’Homme et l’univers découle d’une énergie unique, le Qi, qui se manifeste à travers le Yin et le Yang[6] par le mouvement de 5 éléments : le feu, la terre, l’eau, le bois et le métal.
Si l’Homme s’inscrit dans un tout et suit un cycle naturel, il est aussi envisagé comme un microcosme, notamment influencé par les saisons et l’équilibre des 5 éléments qu’il intègre.
Ainsi, le cycle d’engendrement (Sheng) définit que l’eau nourrit le bois, qui alimente le feu, qui donne naissance à la terre, qui engendre le métal, qui produit l’eau.
Et le cycle de contrôle (Ko) explique que l’eau éteint le feu, qui fait fondre le métal, qui tranche le bois, qui maintient la terre, qui endigue l’eau.
A chacun de ces éléments va correspondre un méridien énergétique, lui-même influençant le psychisme et l’organe physique qui lui est associé.
Exemple : élément bois → méridien du Foie → émotion : colère → organe : foie

Par conséquent, l’activité de chaque élément ne doit être ni en excès ni en déficit, afin de ne pas perturber l’équilibre du cycle et détériorer la santé de l’individu.
Par des pressions sur les points d’acupuncture qui longent les méridiens, le shiatsushi[7] va donc s’attacher à régulariser la circulation de l’Energie (Qi), en appliquant:
· Des modes de pression adaptés aux besoins et à la sensibilité du receveur. Il s’agit de respecter le corps tout en remplissant les vides et en dispersant les plénitudes.
· Diverses techniques telles que des frictions, frottements, percussions, mobilisations musculaires, étirements, poses fluidiques. Tout cela sans exercer de contraintes sur les articulations.
· Un choix de points d’acupunctures à solliciter, en tonification ou en dispersion, selon qu’il faille travailler sur le Yin ou le Yang, sur telle ou telle autre problématique.
· Un rythme général calqué sur l’élément de la saison durant laquelle se déroule le soin (exemple : hiver → élément eau → Shiatsu tranquille et profond).
C’est la prise des pouls chinois en amont de la séance qui permettra de faire le diagnostic énergétique des méridiens, tout comme d’établir si le corps du receveur[8] est bien ou non « dans la saison ».
En effet pour ne pas fatiguer son organisme et être prédisposé à tomber malade, il faut que le rythme du corps soit calé sur celui de la saison en cours. Une personne dont le corps fonctionnera comme en été, en pleine expansion, avec les pores de la peau bien ouverts, attrapera forcément froid s’il fait 0°C dehors. D’où les cas de maladies lors de retours de voyages depuis des pays tropicaux alors que c’est l’hiver en France...
En maintenant l’harmonie, le Shiatsu entretient la bonne santé et prévient les maux du quotidien.
Traitant efficacement les simples contractures musculaires, il règle aussi les déséquilibres de grands rythmes (sommeil, digestion), et va jusqu’à agir sur les troubles émotionnels et les séquelles de trauma psychiques de par son approche holistique.
Les effets physiologiques du Shiatsu tels que définis par Senseï Namikoshi[9] sont en effet nombreux :
· Il vivifie la peau et assouplit les muscles
· Il stimule la circulation des fluides corporels (sang, liquides organiques, etc.),
· Il régularise les fonctions neurales,
· Il contrôle le système endocrinien,
· Il préserve la structure osseuse,
· Il stimule l’action digestive.
· Il régularise la circulation du Qi.
La circulation du Qi, étant une notion abstraite pour nous occidentaux, en voici donc une analogie simple :
Supposons que nous observions une rivière qui s’écoule.
L’eau de la rivière peut être comparée au sang ou aux liquides organiques et le courant qui la fait circuler au Qi.
Si, suite à un éboulement, des rochers bloquent le passage de l’eau, le Qi stagne et il peut s’ensuivre un débordement de la rivière, un croupissement de l’eau…bref une perturbation de l’état normal.
Le praticien de Shiatsu va alors intervenir aux endroits où le Qi stagne pour rétablir la situation et revenir à un état harmonieux : « L’eau qui coule ne croupit pas ».
En pratique, le soin de Shiatsu se déroule habillé et au sol, sur tatami. Rien d’étonnant puisqu’il s’agit d’une pratique relevant de la culture japonaise, mais, en plus de permettre une absorption optimale des pressions, cette position est très symbolique.
Les deux participants sont au contact de la Terre mère nourricière, au même niveau à ras du sol, et le Shiatsushi est humblement à genoux près du receveur. Comme pour confirmer qu’il est au service du Soin, il lui arrive également d’être en position de « chevalier servant ».
Il y a une notion d’égalité d’Homme à Homme dans le positionnement du Shiatsu qui rend cette discipline accessible, et qui invite à faire confiance.
L’approche du Shiatsu est la prévention, car l’entretien de l’harmonie avec la nature est le cœur de la philosophie orientale.
Mais cette discipline intervient aussi pour résoudre des maux (physiques ou psychiques), ou pour accompagner des pathologies en aidant le corps à éliminer les toxines des traitements (cas des chimiothérapies), et en chassant les angoisses et les douleurs.
Par son rôle de stimulation des défenses naturelles, le Shiatsu est également une pratique sur laquelle la médecine conventionnelle peut s’appuyer pour compléter un traitement.
S’agissant d’une véritable médecine holistique, son spectre est large et son efficacité est fonction de l’enracinement du mal.
En effet pour une maison que l’on n’a jamais nettoyée, il ne faut pas s’attendre à la faire briller en une fois, et à résoudre les problèmes de plomberie dus au calcaire et à l’encrassement.
En gros plus le patient aura attendu, plus le problème se sera installé, voire se sera répercuté ailleurs.
Avant de pouvoir s ‘attaquer au problème dans le dur, il y aura alors tout un travail d’élagage, et le shiatsushi s’attachera à traiter ce qui est prioritaire pour le malade, afin de le soulager (il s’agira bien souvent des problèmes de sommeil).
Pour autant, on a déjà vu des problématiques être résolues en une seule séance, comme si le système du receveur n’attendait qu’un petit coup de pouce pour tout remettre dans l’ordre !
En règle générale, face à un individu de petite constitution le praticien renforcera cette dernière, quand il travaillera plutôt à diminuer la maladie pour une personne de bonne constitution.
La prise en compte de la nature du receveur est en effet capitale pour personnaliser le soin et en optimiser les effets.
Ainsi les traits de caractère dominants du demandeur seront également à prendre en compte en cela qu’ils influent sur les méridiens.
Par exemple quelqu’un de colérique par nature est de type bois, et le méridien du Foie aura donc tendance à être en plénitude par rapport aux autres. L’individu pourra alors être sujet à des migraines ou à des crises de foie récurrentes, indiquant un trop plein d’Energie dans la sphère hépatobiliaire.
Bien qu’il respecte un protocole de base, le soin de Shiatsu diffère donc d’une personne à une autre, et il varie également d’une séance à l’autre en fonction du besoin du receveur.
Le raisonnement engagé est basé sur l’observation des faits et amène immanquablement à la racine du problème. Sans intellectualiser et en faisant appel à son bon sens, on peut alors trouver l’explication d’un mal chronique :
Un individu qui a des sinusites à répétition se verra prescrire un décongestionnant chez le médecin, ce le qui soulagera temporairement. Néanmoins l’obstruction dans les sinus étant la conséquence du problème et pas son origine, alors la sinusite reviendra.
En médecine chinoise, on observe que le corps possède 2 modes d’excrétion des déchets : par le bas via les selles, et par le haut via l’expiration. Si l’une des deux voies dysfonctionne, il y aura naturellement surcompensation de l’autre côté.
L’individu souffrant de constipations pourra alors subir des sinusites par surcharge de l’évacuation par la voie supérieure.
Par conséquent en Shiatsu, on travaillera à régulariser la sphère digestive pour que tout rentre dans l’ordre.
En plus des indications recueillies par la prise des pouls chinois, l’observation et les déclarations du receveur, le praticien dispose de clés d’analyse comme l’horloge circadienne et ses marées énergétiques :

Enfin, le shiatsushi connaît le système des méridiens, ainsi que les points d’acupuncture et leurs fonctions pour traiter les maux.

J’entends souvent que le Shiatsu « ça fait mal ». En cas de stagnation, il peut arriver en effet que certains points soient douloureux (surtout lors de la 1ère séance), cependant mes receveurs me disent de ces douleurs qu’elles « font du bien », et même qu’elles sont nécessaires : « j’en avais besoin ».
Pour autant, si tout le Shiatsu est perçu comme désagréable, douloureux, c’est qu’il faut changer de praticien. Le shiatsushi doit adapter son Shiatsu en fonction de la sensibilité du corps qu’il a sous les mains, et il existe de nombreuses techniques pour éviter de faire mal tout en restant efficace (paume de la main au lieu des pouces, fluidique, répartir le travail sur 2 séances…).
Un soin de Shiatsu peut être tonique, apaisant, ou encore martial pour les sportifs, qu’il prépare à l’effort ou qu’il aide à la récupération. Il s’adresse à tous les publics, de tous les âges et, s’adaptant à chaque situation, il ne connaît donc pas de contre-indication.
A ce propos : Non il n’y a pas de points abortifs ! Sinon les faiseuses d’anges et le débat sur l’IVG n’auraient pas existé…
Enfin remboursé par certaines mutuelles, le Shiatsu est une voie de reconnexion à la nature, et une philosophie de vie de par le suivi régulier qu’il demande. En moyenne, une personne en bonne santé devrait recevoir une séance mensuelle comme entretien.
Il s’accompagne souvent de conseils : en gymnastique douce (Qi gong), de posture, en automassages, et parfois de préconisations aromathérapeutiques ou phytothérapeutiques.
En appelant au pouvoir curatif inné du toucher, il permet enfin de reconnecter une personne à ses sensations physiques comme indicateurs pour l’aider à apprivoiser son monde sensoriel, à sortir de son mental et à s’accorder avec son propre corps[10].
IV - Conclusion
Nous vivons dans une société de l’excès, marquée par une lourde histoire d’asservissements et désireuse de s’affranchir des contraintes tout en obtenant des effets immédiats. La volonté de retour au naturel de ces dernières années et le besoin de reprendre le pouvoir sur sa santé ne doit pas engendrer le rejet de la médecine conventionnelle.
Au contraire, nous devons nous féliciter des bienfaits de cette dernière, tout comme le corps médical doit s’enthousiasmer de la réémergence des médecines douces avec lesquelles travailler en complémentarité.
La prédominance de la réalisation d’objectifs est un phénomène moderne que l’on constate également dans le domaine de la santé, où la médecine conventionnelle se fixe comme but de guérir, quand il est si important de soigner.
S’inspirer du passé, de l’ailleurs, pour en garder le meilleur : les approches de raisonnement différentes qui ont fait leurs preuves, la connaissance holistique du patient par son médecin, les remèdes de grand-mère efficaces, les traitements transdisciplinaires…Et conserver nos avancées scientifiques, continuer à chercher, à toujours progresser, mais sans céder à une mode ou à des diktats politico-financiers.
Il convient de trouver un juste milieu avec bienveillance, car la maladie fera toujours partie de nos vies, et il nous faut donc apprendre à vivre avec sans en avoir peur pour en maîtriser les aspects.
Des pratiques complètes telles que le Shiatsu sont déjà à notre disposition pour nous accompagner vers la réappropriation de notre bien-être : car « prendre soin » est l‘affaire de tous et chacun doit prendre ses responsabilités quant à sa propre santé.

[1] Les méridiens sont des circuits, des canaux du corps humain, interconnectés, par lesquels circule le Qi, l'énergie vitale du corps, et qui relient entre eux tous les organes et toutes les fonctions du corps, physiques comme psychiques. [2] Terme chinois désignant un maître qui donne un enseignement à un élève. [3] C.f. la vidéo d’Antoine di Novi Le Shiatsu : définitions fondamentales, avril 2020. [4] Les maladies liées au style de vie ou maladies de civilisation sont définies comme des maladies liées à la façon dont les gens vivent leur vie. La fréquence d'apparition de ces maladies semble augmenter au fur et à mesure que les pays deviennent plus industrialisés et que les gens vivent plus longtemps. [5] In Tao Te King, La Voie de la bonté et du pouvoir, Lao Tseu, Chapitre 25 : L’ordre naturel. [6] Dans la philosophie chinoise, le yin et le yang sont deux catégories complémentaires, qui sont utilisées dans l'analyse de tous les phénomènes de la vie et du cosmos. [7] Nom japonais du praticien de Shiatsu. [8] Personne qui reçoit un soin. [9] Tokujiro Namikoshi (1905-2000), l’un des fondateurs du Shiatsu. [10] C.f. mon article Trauma et émotions, février 2020.